Le Bitcoin est une arnaque pire qu’une pyramide de Ponzi
Robert McCauley est chercheur au Global Development Policy Center de l’Université de Boston, dans le Massachusetts et membre associé de la Faculté d’histoire de l’Université d’Oxford. Il a récemment publié une violente diatribe contre le Bitcoin dans le Financial Times expliquant que le Bitcoin n’est pas une pyramide de Ponzi, mais encore pire que ça.
Le Bitcoin a atteint un nouveau sommet historique à plus de 56.000 euros en novembre 2021, avant de connaître une baisse brutale de 10.000 euros début décembre. Même au prix actuel de 43000 euros, les invités des journaux financiers continuent de le présenter comme l’actif le plus performant de ces dernières années, que l’on parle d’un ou dix ans. Ils le jugent ainsi de plus en plus comme un investissement à part entière.
Cela contredit pourtant l’avis que de nombreux économistes tiennent depuis longtemps selon lequel le bitcoin est en réalité un schéma de Ponzi. L’informaticien brésilien Jorge Stolfi qui a pris part à cette critique a émis les observations suivantes :
- Les investisseurs achètent dans l’espoir de profits purs.
- Ces profits sont réalisés parce que quelqu’un est prêt à vous racheter plus cher vos jetons.
- Il n’y a pas de source externe pour les réaliser, ils viennent entièrement de l’argent des nouveaux entrants.
- Les frais d’opération représentent une large portion de l’argent investi.
Le système de Ponzi
Si ces critiques sont fondées, le Bitcoin ne s’est cependant en dix ans pas effondré comme la pyramide de Ponzi. En 1920, Charles Ponzi a promis un rendement de 50% sur un investissement de 45 jours, rendement qu’il a effectivement payé aux premiers investisseurs. L’arnaque n’a cependant pas durée puisque le stratagème consistant à payer les gains des premiers entrants avec le capital des derniers arrivés s’est écroulé en moins d’un an.
C’est quasiment un siècle plus tard que Bernard Madoff réussit à construire et maintenir en activité la pyramide de Ponzi ayant le mieux réussi. Il promettait à ses investisseurs un rendement de 1% par mois tout en maintenant les fonds disponibles. La crise de 2008, en accélérant les retraits sous l’effet de la panique, a mis fin à son montage.
Contrairement au système mis en place par Madoff, le Bitcoin ne promet pas de générer un revenu récurrent. Il est conçu pour espérer voir sa valeur propre s’apprécier avec le temps. Le seul moyen d’en tirer un bénéfice est donc à un moment de revendre tout ou partie de ses jetons.
Une différence de structure
A système différent, hypothèses différentes. L’effondrement du Bitcoin serait probablement incomparable avec celle d’une pyramide de Ponzi. Un possible déclencheur pourrait venir des stablecoins, véritable point faible de la forteresse crypto. Un effondrement d’un des stablecoins dû à des demandes de retraits massifs (comme ce qui s’est produit pour la pyramide de Madoff) sans un collatéral suffisant entraînerait par effet de contagion l’intégralité de l’écosystème des cryptomonnaies, même les plus solides d’entre elles.
Dans le cas de cette éventualité, les cryptomonnaies étant par essence décentralisées et non régulées, il serait impossible de se retourner contre ses émetteurs ou contre les primo-investisseurs.
Autre hypothèse soulevée, dans son fonctionnement, le Bitcoin se rapprocherait plus à un « pump and dump » qu’à une pyramide de Ponzi. La stratégie dite du « pump and dump » consiste à acheter un titre (souvent une action) de très faible valeur intrinsèque, la rendre populaire via les médias et réseaux sociaux, parfois même à spéculer contre soi-même, afin de le faire monter artificiellement avant de brusquement s’en défaire lorsque sa valeur a atteint le seuil souhaité, et laisser ainsi les autres investisseurs se débrouiller avec cet actif pourri. Comme dans tout essai de « pump and dump », le Bitcoin met l’attention sur de purs gains rapides et faciles en capital. Il en naît la peur de rater l’opportunité de sa vie (Fear Of Missout Out, FOMO en anglais) et ainsi presser les acheteurs en jouant sur leurs émotions. A la différence des pyramides de Ponzi mais conformément au « pump and dump », le Bitcoin ne donne aucun objectif de gain chiffré officiel.
Un jeu à somme négative
Un autre point rend le Bitcoin différent de la pyramide de Ponzi selon Robert McCauley : il remarque que le Bitcoin est un jeu à somme négative là où Ponzi est à somme nulle. En effet, une partie non négligeable du capital investi est utilisé pour faire fonctionner le système : c’est le fameux processus de minage, qui réclame des infrastructures de plus en plus coûteuses. Ponzi ou Madoff n’avaient quant à eux besoin que de deux ou trois personnes pour maintenir leur système en place. Le fait que la totalité de l’argent collecté par ces derniers était redistribué en faisaient un jeu à somme nulle, ce qui n’est pas le cas des cryptomonnaies.
Quel est donc le coût du Bitcoin ? Il est avant tout une pure perte pour ceux qui en possèdent, et un investissement risqué pour ceux qui ont décidé d’être acteur sur ce marché. Le Bitcoin est conçu pour que l’investissement nécéssaire à cette activité aille en augmentant à mesure que le temps passe, ainsi que la consommation d’électricité, qui atteint en 2021 l’équivalent de pays entiers tels que la Nouvelle-Zélande.
Jorge Stolfi a estimé que la consommation totale d’électricité du Bitcoin depuis sa création a atteint en 2021 15 milliards de dollar (13 milliards d’euros). En 2022, environ 900 Bitcoin minés par jour représentent une facture quotidienne de 45 millions de dollars (40 millions d’euros) d’électricité. Le Bitcoin continue cependant de croitre plus vite que le coût de cette facture.
C’est ce coût de maintenance sans équivalent dans le monde de la spéculation qui rend, selon lui, le Bitcoin pire qu’une pyramide de Ponzi.
Un cas unique dans l’histoire
Il serait injuste de ne pas reconnaître le caractère unique du Bitcoin dans l’histoire, tant par son fonctionnement que par son succès. En tant qu’objet de spéculation, le Bitcoin est sans précédent et présente un futur que personne n’est capable de calculer. Considéré comme une blague ou une distraction à ses débuts, il est maintenant un actif qui se compte en milliards de dollars.